La tradition islamique est, en tant que « sceau de la Prophétie », la forme ultime de l’orthodoxie traditionnelle pour le cycle humain actuel. Les formes traditionnelles qui ont précédé la forme islamique (Hindouisme, Taoïsme, Judaïsme, Christianisme,…) sont, dans leurs formulations régulières et orthodoxes, des reflets de la Lumière totale de l’Esprit-universel qui désigne Er-Rûh el-mohammediyah, le principe de la prophétie, salawâtu-Llâh wa salâmu-Hu ‘alayh.
8 Octobre 2010
Le Prophète a dit : "N'insultez pas au Siècle, car il est Allah". Il a voulu dire par ces paroles que l'existence du
Siècle est l'existence d'Allah, qu'il soit glorifié et magnifié. Il est trop élevé pour avoir un partenaire, un semblable ou un équivalent quelconque. Le Prophète dit dans une tradition
qudsî : "Allah dit : Mon serviteur ! J'étais malade, et tu ne M'as pas visité. J'avais faim, et tu ne M'as pas donné à manger. Je t'ai demandé l'aumône, et tu l'as
refusée". Il a voulu dire que c'était Lui qui était le malade et le mendiant. Comme le malade et le mendiant peuvent être Lui, alors toi et toutes les choses de la création, accidents ou
substances, peuvent aussi être Lui. Quand on découvre l'énigme d'un seul atome, on peut voir le mystère de toute la création, tant intérieure qu'extérieure. Tu verras qu'Allah n'a pas seulement
créé toutes choses, mais tu verras encore que, dans le monde invisible aussi bien que dans le monde visible, il n'y a que Lui, car ces deux mondes n'ont point d'existence propre. Tu verras qu'Il
n'est pas seulement leur nom, mais aussi Celui qui les nomme et Celui qui est nommé par eux, ainsi que leur existence. Tu verras qu'Il n'a pas seulement créé une chose une fois pour toutes, mais
tu verras "qu'Il est tous les jours en l'état de Créateur sublime" (Coran, LV, 29), par l'expansion et l'occultation de Son existence et de Ses attributs en dehors de toute
condition intelligible. Car Il est le Premier et le Dernier, l'Extérieur et l'Intérieur. Il paraît dans Son unité et Se dissimule dans Sa singularité. Il est le Premier et du Dernier, de
l'Extérieur et de l'Intérieur, comme l'existence de ces Glyphes est Lui. Il est Son nom ; Il est celui qui est nommé. Comme Son existence est fatale, logique et dogmatique, de même est fatale la
non-existence de tout autre-que-Lui. Ce que nous pensons être autre-que-Lui n'est pas, au fond, un bi-existence, car Son existence à Lui signifie qu'une bi-existence n'existe pas ; sans quoi
cette bi-existence serait Son semblable. Or, autre-que-Lui n'est pas, car Il est exempt de ce qu'un autre-que-Lui soit autre-que-Lui. Cet autre est encore Lui sans aucune différence intérieure ou
extérieure. Celui qui est ainsi possède des attributs sans nombre ni fin.
Celui qui est ainsi qualifié possède des attributs innombrables. Comme celui qui meurt, dans le sens propre du mot, est séparé de tous ses attributs louables ou blâmables, de même, celui qui meurt, au sens figuré, est séparé de tous ses attributs louables ou blâmables. Allah — qu'Il soit béni et exalté — est à sa place dans toutes les circonstances. La "nature intime" d'Allah tient lieu de sa "nature intime" ; les "attributs" d'Allah tiennent lieu de ses "attributs". C'est pourquoi le Prophète — qu'Allah prie sur lui et le salut — a dit : "Mourez avant que vous ne mouriez", c'est-à-dire : "connaissez vous-mêmes vos âmes, votre "proprium", avant que vous ne mouriez". Il a dit encore : "Allah dit : Mon adorateur ne cesse d'approcher de Moi par des œuvres surérogatoires jusqu'à ce que Je l'aime. Et lorsque Je l'aime, Je suis son ouïe, sa vue, sa langue, sa main, etc." Le Prophète veut dire : Celui qui tue son âme, son "proprium", c'est-à-dire celui qui se connaît, voit que toute son existence est Son existence. Il ne voit aucun changement en sa "nature intime" ou en ses "attributs". Il ne voit aucune nécessité à ce que ses attributs deviennent les Siens. Car il a compris qu'il n'était pas lui-même l'existence de sa propre "nature intime", et qu'il avait été ignorant de son "proprium" et de ce qu'il était au fond. Lorsque tu prends connaissance de ce qu'est ton "proprium", tu es débarassé de ton dualisme, et sauras que tu n'es autre qu'Allah. Si tu avais une existence indépendante, une existence "autre qu'Allah", tu n'aurais pas à t'effacer ni à connaître ton "proprium". Tu serais un Seigneur Dieu autre que Lui. Qu'Allah soit béni, de sorte qu'il n'y a pas de Seigneur Dieu autre que Lui.
L'intérêt de la connaissance du "proprium" consiste à savoir, mais à avoir la certitude absolue que ton existence n'est ni une réalité ni une nihilité, mais que tu n'es pas, que tu n'as pas été et que tu ne seras jamais. Tu comprendras clairement le sens de la formule : Il n'y a pas de Dieu si ce n'est le Dieu, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de Dieu autre que Lui, il n'y a pas d'existence autre que Lui, il n'y a pas d'autre que Lui, et il n'y a pas de dieu si ce n'est Lui.
(Le Traité de l'unité attribué à Ibn Arabî - Traduction Abdul-Hâdi / Ivan Agueli, 1911).