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La tradition islamique est, en tant que « sceau de la Prophétie », la forme ultime de l’orthodoxie traditionnelle pour le cycle humain actuel. Les formes traditionnelles qui ont précédé la forme islamique (Hindouisme, Taoïsme, Judaïsme, Christianisme,…) sont, dans leurs formulations régulières et orthodoxes, des reflets de la Lumière totale de l’Esprit-universel qui désigne Er-Rûh el-mohammediyah, le principe de la prophétie, salawâtu-Llâh wa salâmu-Hu ‘alayh.

Futuhat 55 : la connaissance des pensées sataniques 1/3

Si Dieu ne nous faisait saisir les sagesses qui s’y (fîhâ) trouvent incluses

Tu estimerais cette réalité hors de la portée de la pensée et des aspirations (himam).

Elle est si subtile que même les Paroles synthétiques (jawâmi’u-l-kalim) ne sauraient te l’exprimer !

 

Les pensées qui affleurent la conscience (khawâtir) ne peuvent être que de quatre sortes : d’origine seigneuriale (rabbânî), angélique (malakî), psychique (provenant de la nafs) ou satanique ; il n’en existe pas d’autres.

 

Nous avons déjà traité de la connaissance des pensées qui affleurent à la conscience, que ce soit ici ou dans nos autres ouvrages mais, dans ce chapitre, nous traiterons plus particulièrement des pensées d’origine satanique.

 

Diverses catégories de démon

 

Sache que les démons (shayâtin) sont de deux sortes : les uns relèvent du domaine intelligible (ma’nawî) et les autres, qui appartiennent au domaine sensible (hissî), se subdivisent à leur tours en humains et en djinns.

 

Dieu – exalté soit-Il – affirme : Nous suscitons des ennemis à chaque prophète, des démons choisis parmi les djinns et les hommes qui se suggèrent mutuellement de belles paroles trompeuses ; si ton Seigneur l’avait voulu, ils ne l’auraient pas fait. Détourne-toi d’eux et de leurs mensonges (Cor.6.112) en les décrivant comme des individus qui profèrent des mensonges au sujet de Dieu ; et ce qui se déroule entre ces deux catégories génère (hadatha) chez l’homme un démon appartenant à l’ordre intelligible. En effet, lorsqu’un démon, homme ou djinn, fait au cœur de l’homme une suggestion grâce à laquelle il l’éloigne de Dieu, soit il y fait une suggestion particulière sur une question spécifique, soit il y fait une suggestion d’ordre général et lui laisse faire son chemin, ce qui lui ouvre des perspectives auxquelles ni les hommes ni les djinns n’auraient pensé ; c’est alors la nafs qui approfondit cette question (tatafaqqaha fîhi) et déduit de ces arguments spécieux (shubah) des horreurs (umûran) telles que si l’homme venait à les exposer, elles seraient en mesure d’enseigner la transgression à Iblîs lui-même !

 

Ces différentes pensées (litt. : « aspects », wujûh) qui ont été éveillées (dans la conscience) par cette suggestion d’ordre général (« méthode » uslûb) initialement insufflée par un démon humain ou par un djinn, sont appelées des « démons intelligibles » ; car les démons, hommes ou djinns, (qui les ont provoquées), ne les connaissaient pas au départ et ne les avaient pas en vue en tant que pensées spécifiques. De prime abord, ils voulaient seulement lui ouvrir cette porte, sachant que ses capacités naturelles et son acuité d’esprit le pousseraient à une réflexion minutieuse produisant en lui des pensées mortelles qu’ils ne seraient plus en mesure de repousser.

 

La raison de cet égarement réside dans le premier principe (açl) qui fonde (sa réflexion) ; car (au départ) l’homme choisit un principe de base sur lequel il s’appuie et dont il approfondit l’étude par la réflexion (tafaqquh) au point de se détourner de ce principe même.

 

Comment les démons s’introduisent dans l’âme du savant.

 

C’est le chemin que suivent les innovateurs et les hérétiques ; au départ, les démons leur inspirent un principe valable dont ils ne se doutent pas ; puis, surgissent à leur esprit des pensées confuses (talbisât), dues à leur manque de compréhension, qui finissent par les égarer. On attribue en général cette confusion au démon comme en étant le principe… si seulement ils savaient que sur toutes ces questions, c’est le démon qui est l’élève (de l’homme) et qu’il est à son école !

 

Cela est manifeste dans le Shiisme, en particulier chez les imâmites qui ont été initialement abusés par des djinns lesquels leur insinuèrent l’amour des « Gens de la Maison du Prophète » (Ahlu-l-Bayt) et le dévouement à leur égard. Aussi virent-ils dans cet amour un des moyens les plus élevés de s’approcher de Dieu et il en eût été ainsi s’ils s’en étaient tenus à cela sans rien y ajouter. Mais leurs outrances en matière d’amour des « Gens de la Maison » les ont conduits à deux déviations.

Les uns se mirent à détester les compagnons et à les insulter, ne leur reconnaissant aucune préséance et s’imaginant que les « Gens de la Maison » étaient plus dignes qu’eux d’occuper des fonctions mondaines (dunyawiya) ce qui les amena à adopter un comportement déjà connu de tous.

 

Et il y eut un autre groupe qui, à l’injure des compagnons, adjoignit la critique (qadh) du Prophète – sur lui la grâce et la paix -, de Gabriel – sur lui la Paix – et de Dieu Lui-même – que soit magnifiée Sa Majesté -, sous prétexte qu’ils n’auraient pas explicitement fait état de leur rang ni de leur droit au Califat, à tel point que certains d’entre eux n’ont même pas hésité à proclamer  que « Celui qui avait envoyé le « Fiable » (al-Amîn, surnom de Gabriel l’ange de la révélation) n’avait pas été fiable » !

 

Tout ceci s’est pourtant produit en partant d’un principe valable, à savoir l’amour des « Gens de la Maison », qui a généré à travers leurs cogitations stériles une pensée erronée, laquelle les a conduits à s’égarer et à égarer les autres !

 

Considère le résultat de l’outrance (ghuluww) en matière de vie traditionnelle : elle leur a fait perdre toute mesure (« limite », hadd) et les a fait parvenir à l’opposé de leur intention ! Le Très-Haut a dit : Ô gens du Livre, ne soyez pas excessifs dans votre religion au point de déformer la Vérité et ne suivez pas les passions d’une fraction qui s’est égarée dans le passé tout en égarant de nombreux autres et qui se sont éloignés du chemin de la Vérité (litt. : du bon chemin) (Cor.5.77).

 

A d’autres groupes, les démons ont insufflé (dans leur cœur) un principe valable dont ils ne se doutent point car il émane du Prophète lui-même – sur lui la grâce et la paix - : Quiconque établira une règle louable en retirera une récompense pour lui-même ainsi que pour tous ceux qui l’auront appliquée. Mais après leur avoir donné le désir d’agir selon ce principe, les démons les ont délaissés. Alors, tel membre de ce groupe désireux d’obtenir une récompense pour tous ceux qui agiraient de la sorte (à son initiative) s’est mis à l’étude ; et après avoir établi une règle louable, il a craint qu’en se l’attribuant personne ne l’accepte et a forgé en conséquence un hadîth de l’Envoyé de Dieu – sur lui la grâce et la paix – afin de la faire accepter ! Puis, il a justifié son acte comme étant conforme au principe contenu dans le hadîth : Quiconque établit une règle louable…, légitimant ainsi sur le compte de l’Envoyé de Dieu – sur lui la grâce et la paix – en lui faisant dire ce qu’il n’avait pas dit ! Il a même estimé que c’était une œuvre bénéfique, soutenu qu’il était par les principes (contenus dans le hadîth) ! Et lorsque l’ange lui rappelle ces autres paroles du Prophète – sur lui la grâce et la paix – : Que celui qui ment délibérément à mon sujet s’apprête à prendre place dans le feu !, et encore : Mentir à mon propos n’est pas comme mentir sur autrui : quiconque ment délibérément à mon propos prendra place en Enfer !, il les prend comme étant des suggestions diaboliques en argumentant ainsi : ces hadîths ne concernent que celui qui invite les hommes à l’égarement alors que , moi, je n’ai fait qu’établir une règle louable ! Certes, il sera nécessairement récompensé pour avoir établi une règle louable, mais il se chargera également d’une faute (ma’zûr) pour avoir menti à propos de l’Envoyé de Dieu – sur lui la grâce et la paix – et en lui faisant dire ce qu’en réalité il n’avait jamais dit.

 

(Muhyî-d-Dîn Ibn Arabî - al-Futûhât al-Mekkiyyah – Chap.55 : al-khawâtir al-shaytâniyya, traduit par A. Penot)

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