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La tradition islamique est, en tant que « sceau de la Prophétie », la forme ultime de l’orthodoxie traditionnelle pour le cycle humain actuel. Les formes traditionnelles qui ont précédé la forme islamique (Hindouisme, Taoïsme, Judaïsme, Christianisme,…) sont, dans leurs formulations régulières et orthodoxes, des reflets de la Lumière totale de l’Esprit-universel qui désigne Er-Rûh el-mohammediyah, le principe de la prophétie, salawâtu-Llâh wa salâmu-Hu ‘alayh.

René Guénon – Les « Penseurs » de l’Islam

René Guénon – Les « Penseurs » de l’Islam

Comptes-rendus publiés dans
la Revue de Philosophie,
1923-1924

Baron Carra de Vaux – Les Penseurs de l’Islam – I. Les souverains, l’histoire et la philosophie politique – II. Les géographes, les sciences mathématiques et naturelles (Deux vol. in-16° de 384 et 400 pp,, P. Geuthner, Paris, 1921).

Ces volumes sont les deux premiers d’une série qui doit en comporter cinq et qui a pour but de donner un aperçu d’ensemble sur l’intellectualité musulmane dans toutes les branches où s’est exercée son activité. « Nous avons voulu, dit l’auteur, faire ici, non un catalogue, mais un choix. Notre intention n’a pas été de tout dire, mais de mettre en relief les figures principales, de faire connaître les œuvres maîtresses, de donner le sentiment de quelques idées essentielles, la vue de certains sommets », Le besoin se faisait grandement sentir, en effet, d’un tel ouvrage, donnant les indications nécessaires pour se reconnaître parmi la multitude des travaux de détail auxquels se complaisent d’ordinaire les orientalistes.

Le titre général peut prêter à une critique, car il ne semble pas parfaitement exact ; du moins le mot de « penseurs » y est pris dans une acception très large. On peut s’en rendre compte par les sous-titres : les personnages dont il est question jusqu’ici, sauf un petit nombre d’exceptions, ne sont pas des penseurs au sens où on l’entend habituellement ; sans doute l’emploi de ce mot sera-t-il plus justifié pour les volumes qui doivent suivre. Quoi qu’il en soit, il y a là des exposés fort intéressants, notamment dans le second volume, plus particulièrement important en ce qui concerne l’histoire des sciences ; on ne sait pas assez, en Europe, tout ce qu’on doit aux Arabes, par qui se sont conservées et transmises en grande partie les connaissances de l’antiquité, sans compter tout ce qu’eux-mêmes y ont ajouté, notamment dans l’ordre mathématique. C’est ce qui ressort très nettement de cet ouvrage, dont l’auteur fait preuve, à cet égard, de beaucoup d’impartialité ; malheureusement, il n’en est pas de même lorsque vient à se poser la question des origines : il veut que la science arabe se soit inspirée à peu près exclusivement de la science grecque, ce qui est vraiment excessif. Que les derniers néo-platoniciens se soient réfugiés en Perse, et que de là ils aient exercé une certaine influence sur le monde musulman, cela est fort admissible ; mais enfin il y a eu autre chose, et, en Perse même, le Mazdéisme n’était pas un élément négligeable (notons d’ailleurs, à ce propos, ce fait trop généralement ignoré, que les musulmans honorent Zoroastre comme un prophète). En astronomie, les Perses devaient sans doute beaucoup plus aux Chaldéens qu’aux Grecs ; et, d’un autre côté, il ne nous paraît pas que la secte arabe des Sabéens, qui fournit beaucoup de savants dans les quatre premiers siècles de l’Islam, puisse être regardée comme se rattachant proprement au néo-platonisme. D’ailleurs, celui-ci, au fond, n’était-il pas plus oriental que grec sous bien des rapports, et n’est-ce pas pour cela, précisément, que les Orientaux accueillirent volontiers parmi eux ses représentants ? Mais c’est surtout quand il s’agit de l’Inde que le parti pris devient par trop manifeste : quand les Arabes eux-mêmes appliquent à quelque chose l’épithète de hindi, « cela ne tire pas à conséquence », et il suffit que l’influence indienne « ne soit pas évidente » pour qu’on l’écarte résolument, tandis que, par contre, on fait valoir en faveur de l’influence grecque les coïncidences les plus insignifiantes. Il y aurait beaucoup à dire sur certains points, comme l’origine des chiffres, celle de l’algèbre, la question des périodes astronomiques, et aussi, pour la Chine, l’invention de la boussole ; mais nous ne pouvons y insister davantage. Ajoutons seulement une dernière remarque : il est pour le moins singulier de présenter l’empereur mogol Akbar comme « un des pères du théosophisme moderne » ; si peu orthodoxe qu’ait pu être le syncrétisme religieux de ce souverain, il ne méritait vraiment pas cette injure, car c’en est bien une, encore que l’auteur ne semble pas du tout la considérer comme telle. Mais ces diverses réserves, qui ne portent pas en somme sur ce qu’il y a de plus essentiel, ne doivent pas nous faire méconnaître la réelle valeur d’un ouvrage fort consciencieusement fait et qui peut rendre de très grands services.

Baron Carra de Vaux – Les Penseurs de l’Islam – III. L’exégèse, la tradition et la jurisprudence (Un vol. in-l6 de 424 pp., P. Geuthner, Paris, 1923).

Nous avons déjà parlé ici (n° de novembre-décembre 1923) des deux premiers volumes de cet ouvrage ; nous pouvons, à propos du troisième, répéter ce que nous disions alors : ce travail est appelé à rendre de grands services à ceux qui, sans avoir le temps ou la possibilité de se livrer à des recherches multiples, désirent se faire une idée d’ensemble de l’intellectualité musulmane. En dépit du sous-titre, la plus grande partie du troisième volume est en réalité consacrée à un résumé historique des origines de l’Islam, où apparaissent malheureusement les défauts et les préjugés inhérents à la mentalité de notre époque. La lecture de certaines pages, comme celles où est discutée la question de savoir si le Coran a toujours constitué un « livre » (pp. 156-163), serait à conseiller à ceux qui sont tentés de prendre trop au sérieux les résultats de la « critique » moderne. Il est bon aussi d’enregistrer cet aveu, qu’une interprétation religieuse « n’a point de sens pour la critique » (p. 158) ; ne pourrait-on pas renverser la proposition, et dire tout aussi bien que les arguments « critiques » n’ont point de sens pour quiconque se place au point de vue religieux ou, plus généralement, traditionnel ? En effet, la « critique », ainsi entendue, n’a jamais été au fond autre chose qu’une arme de guerre antireligieuse ; ceux qui croient devoir prendre à son égard une attitude plus ou moins conciliante et « opportuniste » sont victimes d’une bien dangereuse illusion. Passons à quelques observations de détail ; et, tout d’abord, regrettons que l’auteur écrive assez souvent « mahométan » au lieu de « musulman » ; le mot est d’usage courant, sans doute, chez les Européens, mais il n’en est pas moins fautif pour bien des raisons. Une autre inexactitude, et qui est plus grave, est celle qui consiste à parler de l’Islam, ou encore du monde arabe, comme d’une « nationalité ». – Conserver une phrase qu’on reconnaît soi-même erronée, sous le prétexte qu’elle « fait bien littérairement » (p. 100), cela semble peu sérieux et risque de déconsidérer un ouvrage qui, pourtant, vaut mieux que cela dans son ensemble. – Il y a aussi quelques affirmations plus ou moins contestables, comme celle qui attribue au blason une origine exclusivement persane (p, 10) ; ne sait-on pas que, dès l’antiquité, il existait aussi ailleurs qu’en Orient, et notamment chez les peuples celtiques ? – Avant de se moquer d’une tradition dans laquelle il est question de « géants » (p. 78), il serait bon de savoir que ce mot et ses équivalents étaient employés très généralement pour désigner des hommes puissants, des peuples guerriers et conquérants, sans aucun égard à leur stature réelle. – Notons encore une erreur sur les termes nabî (prophète) et rasûl (législateur), dont le rapport hiérarchique est renversé (p. 153), et une opinion peu justifiée, pour ne pas dire plus, sur la signification des lettres qui sont placé au début de quelques sourates du Coran (p. 176).

Les derniers chapitres contiennent de bons exposés sur la tradition (hadîth), sur la jurisprudence, et enfin sur les commentaires du Coran.

[René Guénon : deux comptes-rendus publiés dans la Revue de Philosophie, respectivement dans le numéro de Novembre-décembre 1923 et celui de Janvier-février 1924]

- Annexe - Extrait d’une lettre de René Guénon à Guido de Giorgio (Paris, 20 novembre 1925) :

« (…) J’ai fait dernièrement la connaissance de Massignon ; il parle beaucoup, et il y a chez lui une certaine affectation, qui d’ailleurs se sent aussi dans son style. Il est vrai que ses ouvrages sont assez difficiles à lire, et d’autre part, s’il a assurément compris certaines choses, il n’a pourtant pas pénétré le fond de l’ésotérisme musulman. Quant à Carra de Vaux, il comprend encore beaucoup moins, et, même au point de vue de l’exotérisme, il lui arrive de commettre d’assez grosses erreurs. C’est surtout un compilateur, et la principale utilité de ses ouvrages consiste en ce qu’il y a réuni des renseignements qui se trouvaient épars un peu partout. (…) »

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C
Thanks for sharing this great post.This is so nice.
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C
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S
guzel paylasım
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S
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