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La tradition islamique est, en tant que « sceau de la Prophétie », la forme ultime de l’orthodoxie traditionnelle pour le cycle humain actuel. Les formes traditionnelles qui ont précédé la forme islamique (Hindouisme, Taoïsme, Judaïsme, Christianisme,…) sont, dans leurs formulations régulières et orthodoxes, des reflets de la Lumière totale de l’Esprit-universel qui désigne Er-Rûh el-mohammediyah, le principe de la prophétie, salawâtu-Llâh wa salâmu-Hu ‘alayh.

Fusus al-Hikam : Le chaton d’une sagesse de l’âme dans un verbe de Yûnus (Jonas) 1/2

1. Sache que cette constitution humaine dans sa perfection : esprit, corps et âme (2), Allâh l’a créée selon Sa Forme. Le pouvoir de « dénouer » cet ensemble (3) appartient uniquement à Celui qui l’a créé (4) ; soit (qu’il fasse mourir) de Sa propre Main – ce qui est toujours le cas en réalité (5) – soit (que la mort donnée) en vertu de Son Ordre. Celui qui s’attribue ce pouvoir sans en avoir reçu l’ordre d’Allâh se fait tort à lui-même (6), transgresse la limite qu’Allâh a fixée à son sujet (7), et entreprend de détruire (8) celui (9) qu’Allâh a ordonné d’édifier (10).

Sache que cette clémence à l’égard des serviteurs d’Allâh est plus digne de celui qui a la charge de les garder qu’un zèle Allâh (11).

 

(1) âme : selon la lecture nafs, généralement adoptée ; mais on peut lire aussi nafas (souffle, respiration). Jâmî indique que cette seconde lecture est celle d’un manuscrit vérifié par Ibn Arabî.

(2) Nafs. La présence de ce terme au début du texte confirme la signification retenue pour le titre. L’âme est intermédiaire entre le corps et l’esprit tout comme l’homme primordial l’est entre l’état d’existence dont il est le centre et l’Esprit divin.

(3) Nizâm ; littéralement : « composition, structure ». Allusion à la mort qui peut être envisagée comme un dénouement du « nœud vital » ; cf. René Guénon, Symboles fondamentaux de la Science sacrée, chap. LXVIII.

(4) Littéralement : « qui l’a créée » (sous-entendu : cette constitution).

(5) Littéralement : « et il n’y a que cela ». Allusion à Cor.39.42 : Allâh reprend les âmes au moment de leur mort.

(6) Allusion à Cor.65.1 : Celui qui transgresse les limites fixées par Allâh en vérité se fait tort à lui-même.

(7) Les commentateurs comprennent : « au sujet de cette constitution », seul Nâbulsî comprend : « au sujet de cette manière d’agir ».

(8) Allusion à Cor.2.114 : Qui est plus injuste que celui qui empêche que Son Nom soit invoqué dans les Mosquées d’Allâh, et qui entreprend de les détruire. Cette allusion est particulièrement significative car elle confirme la présence ici d’un symbolisme constructif, évoqué aussi par le terme ’imâra (édification) et par le contenu du paragraphe 2.

(9) oc « ce » selon Bâlî qui lit mâ plutôt que man.

(10) Littéralement : « dont Allâh a ordonné la construction » ; on pourrait comprendre aussi : « dont Il a ordonné la prospérité », si on lit ‘amâra au lieu de ‘imâra.

(11) Sous entendu : qui conduirait à les mettre à mort.

 

2. Dâwûd – sur lui la Paix ! – voulut construire le Temple de Jérusalem (12) et entreprit sa construction à maintes reprises, mais chaque fois qu’il était sur le point de l’achever, celui-ci s’écroulait. Il s’en plaignit auprès d’Allâh qui lui répondit par voie d’inspiration : « Cette Maison qui est Mienne ne sera pas érigée par les mains de quelqu’un qui a versé le sang. » Dâwûd dit alors : « O Seigneur, cela n’a-t-il pas été fait pour toi ? (13) » (Allâh) répondit : « Certes ! Mais ceux (que tu as tués) n’étaient-ils pas Mes serviteurs ? » (Dâwûd) reprit : O Seigneur, fais-la construire alors par quelqu’un de ma descendance ». Allâh lui révéla par voie d’inspiration : « C’est ton fils Sulaymân qui la construira. »

Le but de cette histoire est de montrer les égards qu’il faut avoir pour la (14) constitution humaine ; il est préférable de maintenir son existence que de la détruire.

 

(12) Al-bayt al-muqaddas ; littéralement : « la maison sanctifiée ».

(13) Littéralement : dans Ta voie.

(14) Littéralement : cette.

 

3. Considère les ennemis de la religion : Allâh les a soumis à l’impôt (islamique) et a prescrit la conciliation afin de les épargner en disant : Et s’ils s’inclinent vers la paix, fais de même et remets (l’affaire) à Allâh (15).

Considère celui contre lequel on est en droit d’exiger le talion : il est prescrit à qui a la charge de venger le sang (16) d’accepter une rançon ou d’effacer (17) ; c’est (uniquement) s’il refuse (une de ces deux solutions) que la sentence sera exécutée.

Considère (Dieu) – gloire à Sa transcendance !- dans le cas où ils sont plusieurs à avoir cette charge et que l’un deux se satisfait du prix et efface, alors que les autres ne veulent rien que la mise à mort, comme Il marque Sa considération pour le premier et lui donne la prépondérance sur ceux qui ne pardonnent pas, de sorte que le talion n’est pas infligé.

Considère (le Prophète) – sur lui la Paix !- qui a dit au sujet de celui qui était en possession de la ceinture (18) : « S’il le tue, il est pareil à lui ! » (19)

Considère (Dieu) disant : La compensation d’une mauvaise action est une mauvaise action semblable à elle… (20). Il a défini le talion comme une mauvaise action (21) ; autrement dit : un tel acte est un mal, bien qu’il soit légal… tandis que celui qui efface et amende (22) son salaire est à la charge d’Allâh. En effet, celui qui bénéficie (de ce pardon) (23) est selon « Sa Forme ». Le salaire de celui qui l’accorde et renonce à mettre à mort est à la charge de Celui selon la Forme duquel est le bénéficiaire, et qui a plus de droit (au pardon) que celui-ci puisqu’Il l’a constitué (tel qu’il est) pour Lui : Il ne peut Se manifester par le Nom « l’Extérieur » qu’au moyen de la réalité actuelle de l’homme (24). Celui qui a des égards pour l’homme n’a en réalité d’égards que pour Dieu.

 

(15) Cor.8.61.

(16) Walî ad-dam.

(17) Sous-entendu : le châtiment de la peine capitale.

(18) Nis’a ; il s’agit d’un lien fait d’une pièce de cuir assez large.

(19) Quelqu’un avait été tué au moyen d’une ceinture qu’il possédait et qui fut trouvée dans la main d’un homme que le Walî ad-dam voulut mettre à mort. Le Prophète – sur lui la Grâce et la Paix ! – dit alors : « S’il le tue, il est pareil à lui » (sous-entendu : dans l’injustice, car il met à mort sans preuve légale).

(20) Cor.42.40.

(21) Semblable à celle qu’il est censé compenser.

(22) Aslaha ; c’est-à-dire en réprimandant celui qui est sous une menace de mort.

(23) Grammaticalement, on pourrait comprendre aussi que c’est celui qui pardonne qui est selon la Forme divine, mais le contexte désigne indubitablement le bénéficiaire du pardon.

(24) Littéralement : de sa réalité actuelle.

 

4. Ce qui est blâmable dans l’homme n’est pas son être (25) mais les actes qu’il commet ; ses actes ne sont pas son être, et c’est de son être que nous parlons.

Aucun acte qui n’appartienne à Allâh ; néanmoins certains sont blâmés (26), d’autre sont loués. Le langage du blâme qui procède des motifs individuels (27) est lui-même blâmé auprès d’Allâh. Le seul blâme (légitime) est celui que la Loi sacré prononce, car il est motivé par une sagesse connue d’Allâh et à ceux à qui Allâh l’a fait connaître. Ainsi, il a prescrit le talion en vue d’un double avantage : maintenir le genre humain et retenir ceux qui voudraient transgresser les limites fixées par Allâh à son sujet (28) ; Et il y a pour vous dans le talion une vie, ô vous qui êtes doués de moëlle, (29) (c’est-à-dire) ceux qui connaissent la moëlle des choses (30) et qui ont trouvé le secret des Lois (31) divines et humaines (32).

 

(25) Li-‘ayni-hi.

(26) Nâbulusî considère que le verbe est l’actif : « néanmoins Allâh en blâme certains ».

(27) ‘Alâ jihati-l-gharad.

(28) Au sujet du genre humain ou au sujet du talion.

(29) Cor.2.179.

(30) Littéralement : « les Gens de la moëlle ».

(31) Nawâmîs. Les commentateurs y voient un simple équivalent de sharâ’i’.

(32) Hikmiyya ; littéralement : « sapientiales ». Les premières sont réalisées en vertu d’une inspiration directe « au moyen d’un organe prophétique d’élection providentielle » (cf. l’introduction de Michel Vâlsan au Livre de l’Extinction) ; les secondes qui contiennent un élément de spéculation et de sagesse « humaine », n’ont pas la même pureté traditionnelle.

 

5. Si tu possèdes la science des égards qu’Allâh a pour cette constitution humaine et pour son maintien (33), à plus forte raison dois-tu en avoir, toi aussi, car c’est en cela que réside ta propre félicité. Tant que l’homme demeure en vie, on peut espérer de lui l’obtention de la perfection (34) pour laquelle il a été créé ; celui qui entreprend de le détruire l’empêche d’obtenir ce pour quoi il a été créé.

 

(33) Ce paragraphe apparaît comme une conclusion des trois premiers, et le paragraphe 4 comme une incidente

(34) Littéralement : « de l’attribut (sifa) de la perfection ».

 

(Ibn Arabî - Le Livre des chatons des sagesses – traduction, notes et commentaires de Charles-André Gilis ; p.505-508).

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